mardi 20 septembre 2011

Harcèlement sexuel en Tunisie : Faut-t-il en parler ?

Est ce que le sujet du harcèlement sexuel reste encore un sujet taboo en Tunisie ?  Si c'est le cas, nous, association Amena, croyons enfin qu'il est temps de briser ce silence et adresser ce problème.
Dans ce sens, Mohamed Bouamoud du webmanager center, a abordé cette question dans son article en ligne.
D'aprés lui, en dehors d’un éventuel fait divers qui aurait assez fait parler de lui, les médias sont-ils invités à traiter du harcèlement sexuel ?... On ne se serait pas posé une telle question si l’un de nos interlocuteurs, un chef d’entreprise auquel on s’est adressé pour avis ne nous avait pas demandé ceci : «Et pourquoi donc Webmanagercenter s’intéresse tout d’un coup à cette histoire ?». Il est clair que le harcèlement est longtemps resté dans notre pays un sujet tabou, une honte autour de laquelle on ne devrait jamais tourner ni y faire la moindre allusion. C’est que la question meurtrit les femmes et gêne énormément les hommes. Jamais Tunisienne –sauf cas extrême– n’oserait déclarer être, ou avoir été, l’objet d’un harcèlement sur le lieu de son travail.
 
De même que jamais Tunisien n’oserait se prévaloir d’avoir harcelé une collègue au bureau. Mais ce silence –de la part des femmes– a presque failli donner l’impression que la Tunisie est et a toujours été à l’abri d’un tel phénomène de société (ou de bureau qu’il faudrait dire ?). Or, ce serait contradictoire en quelque sorte.
 
Car la Tunisie est indiscutablement un pays évolué et moderne. Comment donc faire croire que les Tunisiens ont hérité les bonnes manières et les qualités des peuples modernes (les Européens et les Occidentaux) et rejeté en bloc tous leurs défauts ?... Ce serait mesquin. D’autant plus que le mal (sous toutes ses formes) n’est pas le propre de telle ou telle nation, mais une généralité qui n’a épargné aucune société. Et quitte à choquer tout le monde, on va avancer ici une quasi-certitude : il y a dans chaque homme un harceleur potentiel. Sauf !... Sauf qu’il est des hommes dont les freins sont très solides, mais très usés et presque inexistants chez d’autres. Ce que nous qualifions ici prosaïquement d’usure de freins, le Pr. Samuel Lepastier l’explique scientifiquement en brossant le portrait du harceleur que vous lirez avec intérêt dans ce dossier. Loin de nous, ici, l’idée de jouer aux moralisateurs et aux champions de l’éthique, mais on voudrait attirer l’attention sur un élément très important à nos yeux et qui semble échapper à beaucoup. Dans le combat inlassable que mène le harceleur pour obtenir des faveurs que nul ni rien ne l’y autorise (et même pas sa victime), il y a un aveu par trop avilissant pour lui-même et pour les hommes en général, celui de dire indirectement à une femme : «Sans toi, je mourrais».
 
Que cela soit dit en passant, mais il ne nous semble pas futile de rapporter ceci. Dans la foulée de notre recherche d’un chef d’entreprise ayant eu à gérer un possible cas de harcèlement dans son administration, nous sommes tombés sur un P.d.g. qui, après avoir ri, nous a dit : «Faites le tour des bureaux et revenez me dire comment une tentative d’un harcèlement pourrait avoir lieu chez moi». En fait, nous n’avons rien compris au début. Mais en faisant le tour de son administration, grande était notre surprise de constater ceci : toutes les portes des bureaux sont en verre, et pas une n’était fermée. De sorte que tout un chacun (même les visiteurs) peut voir tout un chacun à tout moment. Même lui, le premier responsable, garde ouverte sa porte en verre. Sans commentaire…
 
En tout cas, sujet tabou ou pas, une loi est arrivée il y a un peu plus d’une année pour sanctionner le délit du harcèlement. Et c’est probablement le combat des Femmes Démocrates qui a contribué à sa promulgation. Car –sauf possible erreur de notre part– la seule Association qui ait mené un tel combat dans le pays n’est autre que l’ATFD. (Nous avons adressé par deux fois un fax à l’UNFT pour éléments de réponse sur la question : pas de réponse). Au mois de décembre 2003, l’ATFD a organisé une campagne nationale contre le harcèlement sexuel, et particulièrement sur les lieux de travail. Dans cette campagne, l’Association a réussi au moins sur deux fronts : faire entendre sa requête par toutes les instances du pays (et les médias avec à la suite d’une conférence de presse), et surtout briser le mur du silence en invitant certaines victimes à raconter par le menu détail les mésaventures auxquelles elles ont été exposées.
 
Pourquoi Webmanagercenter s’intéresse tout d’un coup au harcèlement sexuel ? Parce que le phénomène existe. Parce que la loi existe. Parce que cela fait partie du devoir du journaliste. Parce que le harcèlement est un coup dur porté à la dignité de la femme. Surtout, parce que la femme harcelée peut un jour être votre sœur, votre fiancée, votre femme, votre cousine, votre voisine, sinon votre mère…


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